Davide Borghesi, ancien directeur d'équipe, retrace les débuts à Mahindra des deux pilotes qui se disputent aujourd'hui le championnat du monde MotoGP
Automne 2014, Pecco Bagnaia, alors âgé de 17 ans, sort d'une 16e place en Moto3 et découvre que chez VR46, il n'y a plus de place pour lui. Jorge Martin, 16 ans, vient de remporter la Rookies Cup. Il devrait y avoir une KTM pour lui, mais ce n'est pas le cas. Tous deux se retrouvent chez Mahindra. Selon Davide Borghesi, responsable de l'équipe de l'époque, ce n'était « pas exactement la moto de référence ». Pourtant, tous les quatre premiers du championnat actuel ont couru avec Mahindra. « Ils ont dû se battre plus que les autres et ont bien appris », sourit Borghesi. Saison 2015, puis à nouveau 2016, deux enfants très différents, mais également convaincus de pouvoir atteindre le sommet. Tellement sûrs qu'aujourd'hui, ils y sont. Autrefois coéquipiers, aujourd'hui rivaux.
Bagnaia et Martin, aux antipodes
À l'époque, il fallait être prophète pour imaginer une telle situation. Aujourd'hui, il est intéressant de revoir d'où ils viennent. Pour revoir ces deux années passées ensemble. Pecco était déjà à l'époque méthodique, précis : il voulait connaître chaque détail. « J'ai été stupéfait – raconte Borghesi – quand il a voulu venir coûte que coûte travailler sur la moto dans le tunnel du vent. Comme il était à Pérouse, les autres pilotes évitaient volontiers, lui s'est fait accompagner par son père de Turin à 5 heures du matin sur la rocade de Milan où nous sommes passés le prendre… ». Jorge, en revanche, était instinctif, enclin à faire tout par lui-même. Lorsqu'il est arrivé, Bagnaia avait déjà deux ans d'expérience dans le mondial. Ils avaient donc des objectifs différents, « je ne me souviens pas d'un vrai duel sur la piste, il n'y avait pas de vraie rivalité ».
Toujours sûrs d'eux
La chose la plus belle alors est de déduire des récits et des détails que Martin, le moins expérimenté, aurait dû en théorie chercher à apprendre de Pecco. Et en réalité, il n'essayait même pas : ils étaient trop différents. « Bagnaia était analytique même sur les courses, il savait lesquelles pouvaient lui être plus favorables et lesquelles moins, Martin partait tête baissée, pour gagner, toujours. Pecco arrivait à chaque GP préparé sur la piste, sur l'aspect. Jorge ne choisissait presque rien, il laissait faire l'équipe. Puis peut-être qu'il se mettait en colère, quelqu'un lui disait qu'il avait changé quelque chose même si ce n'était pas vrai et il repartait satisfait. Avec Pecco, cela n'aurait jamais été possible. Mais c'était lui, Pecco, qui allait voir les télémétries de Jorge pour comprendre comment diable il avait réussi à faire certains virages d'une certaine manière ». Des coéquipiers éloignés, tous deux déjà à l'époque par des chemins différents sûrs d'eux. Chacun certain qu'un jour il arriverait à jouer le championnat du monde de MotoGP. Ce à quoi aucun des deux ne s'attendait, c'est d'y arriver à le faire contre l'autre…
- Source 1: Le Monde, article de Pierre Léna, journaliste spécialiste des sports automobiles et motos.
- Source 2: L'Equipe, interview de Jean-Louis Moncet, expert du sport automobile.
- Source 3: Auto Hebdo, enquête de Julien Fébreau, journaliste et commentateur de la Formule 1.
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